Jeannot Almodovar se souvient et raconte:
Je vais vous parler du bar de mes parents, le bar du Commerce, chez Gaétano comme disaient les arzewiens. Ce lieu était une école de vie.
Le café Du Commerce se situait face à l'église , au kiosque à musique et à la rue qui montait vers l'école et le marché.
A 5 heures 30, mon père ouvrait le bar pour les pècheurs qui partant en mer s'arrêtaient prendre leur petit café. Ensuite il allait chercher taillos et beignets chez Santiago, nous les dégustions au petit déjeuner. A 8 heures, Gaétan prenait la relève au bar relayé à 11 heures par mes parents, ma mère ayant au préalable préparé la kémia du jour, sardine à l'eskabech, poulpes, poix chiche en salade, olives cassées, noires et j'en passe tout cela accompagné d'une anisette bien fraiche!
Gaétan menait la direction du bar, ce fut son métier jusqu'à notre départ, d'ailleurs ses projets étaient d'acheter un bar à Port-vendres mais ça n'a pas pu se faire.
Pourquoi ce bar était une école de vie? Les parties de cartes, dignes d'un film de Pagnol, seul l'accent n'était pas le même. Autour de la table des joueurs, les clients se mêlaient au jeu, chacun apportant sa note d'humour ce qui énervait fortement le perdant, mais comme toujours tout finissait bien et avec la sacro sainte tournée d'anisette.
Une spécialité des gens d'Arzew, les surnoms! Pour beaucoup on ne les connaissait que de cette manière, à savoir par exemple, Rata le ventriloque, Pichouno, Penis, bouroum et son petit chien , negret , gaillo, etc et j'en passe des meilleurs.
Un jukbox et un billard trônaient dans la salle ça faisaient le bonheur des amateurs de musique à la mode comme moi même et des clients du bar.
Le dimanche, les pêcheurs revêtaient leur chemise blanche et faisaient la tournée des nombreux bars de la ville, beaucoup finissaient la journée avec un bon petit coup de soleil d'anisette!!!
Pour la saison estivale, la fréquentation du bar doublait avec les vacanciers et les militaires des casernes d'Arzew. Pour faire face à toutes ces demandes, les frigos étant pleins, mes parents rajoutaient dans des grandes bassines en fer des gros pains de glace pour y conserver les boissons.
La terrasse était installée sur la place durant les fêtes du 15 aout, elle ne désemplissait pas, sur la photo, on peut apercevoir la dame qui faisait brochettes , merguez et melsa, je suis désolé j'ai oublié son nom.
Parfois la pression montait et des petits conflits éclataient entre Arzewiens et hommes de troupe et cela pour des raisons que vous devinerez, c'était presque normal en cette période de troubles.
Chaque semaine Mr Perlès portait les affiches des derniers films sortis sur les écrans pour qu'elles soient affichées dans le bar.
A la période du Tour de France, mon frère affichait les résultats et le gagnant de l'étape. Les clients se prenaient au jeu, chacun donnant son avis sur les cyclistes ,comme de nos jours il y avait les stars du cyclisme( Anquetil, Poulidor, Gemignani et le roi de la montagne surnommé l'aigle de Tolède, Bahamontès), et leurs admirateurs.
Je ne terminerai pas sans faire un petit clin d'oeil à ma cousine Annie qui s'en souvient encore aujourd'hui. Lorsqu'elle venait au bar, elle appréciait beaucoup les orangina et les casse-croute de pain et merguez que je lui offrais de bon coeur avec ma patience d'ange à son égard ( là elle va sourire)!
Voila un petit bout de vie du café du Commerce, endroit où j'ai passé une bonne partie de ma jeunesse, temps béni avec ma famille et mes chers amis.
Après 53 ans, j'ai essayé de faire revivre quelques anecdotes, j'ai de quoi raconter, peut-être je ferai une suite un jour prochain.
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